lundi 17 janvier 2011

Penser ? Vivre !

Cette année de transition est pour décider, organiser et construire une nouvelle orientation.

Maintenant, cependant, ma pensée continue de subir une sorte de dissociation. D’un côté je souscris au matérialisme dialectique bien compris. Je me réfère au fameuses thèses sur Feuerbach où se trouve l’intuition marxienne fondatrice en sa cristallisation naissance (in statu nascendi) et ce dispositif de pensée ne se préoccupe strictement que de travailler efficacement sur ce plan d’immanence.

D’un autre côté, par le truchement d’une sorte d’intuition sur l’infini, avec une communication non limitée par les cadres logiques de la science matérialiste avec l’univers, sa vibration fondamentale, que l’on peut continuer, si l’on veut de choisir de nommer Dieu Créateur, je fais appel à une PRATIQUE d’une sorte d’effusion mystique, qui me semble pouvoir compléter le côté strictement limité de l’approche du matérialisme historique et dialectique. Yoga aurobindien, teinté de taoïsme…

Habituellement je ne ressens pas très fortement cette contradiction comme un problème. Avec le vieillissement, malheureusement plus que la maturation dont j’aimerais me targuer… je me suis désengagé des luttes et l’issue politique est vécue par moi d’une manière moins urgente. Mais au plan de la cohérence de la pensée, et donc de la pratique, comme de la sensation et la construction de l’engagement existentiel, je ne peux pas ne pas éprouver quelques tiraillements…

Alors je me débrouille avec une sorte de bricolage poétique où je m’imagine qu’il faille deux ailes à l’oiseau (de ma pensée, que dis-je, de mon être!) pour voler. Voler! et non plus simplement marcher… Remarque que cela serait déjà pas mal… Mon pas seulement le savoir et l’imaginaire, non pas seulement l’essai et le poème, non pas seulement la raison et le cœur, non pas seulement le corps sensible et l’âme désirante, mais encore, la pensée critique et l’envol spéculatif, l’esprit de lourdeur du « sens de la terre! » ! auquel nous conviait Nietzsche et l’expérience immanente d’une transcendance, sentie comme fusion intérieure et effusion à l’infini.

Alors, il ne s’agit pas seulement de résorber cette contradiction en conciliant les contraires. Il s’agit de la dynamiser et d’en faire l’unité éprouvée d’un chemin. D’où mon intérêt renouvelé pour les pensées orientales, toutes plus intéressantes les unes que les autres, dans l’accès qualitatif… mais en contradiction avec l’approche marxienne, que je ne veux pas abandonner.

Comment penser sainement quand on appartient à une civilisation très malade et en participant, même le moins possible, à des sociétés déséquilibrées ? C’est tout un travail et cela exige peut-être plus, probablement, que la meilleure des expertises philosophiques. Le grand rôle du philosophe comme « médecin de la civilisation » est sérieusement mis à mal quand celui-ci, sujet social chevillé à sa finitude délabrée est emporté par la même maladie.

Les choses en sont venues au point où l’on s’aperçoit que cette civilisation n’a cure de durée. Elle est bien évidement condamnée à disparaître très rapidement. C’est la motivation première de mon intérêt pour les civilisations chinoises et indiennes : elles s’inscrivent dans une durée plus longue, significative et en particulier la civilisation chinoise entretiens explicitement la volonté de projets qui se déroulent sur des millénaires. Je ne vois pas ce qui pourrait l’empêcher de prendre progressivement le contrôle et de présider au destin de la planète pour une longue époque qui verra l’expansion de l’espèce humaine vers les plus prochaines étoiles.

La pensée marxienne est saine mais limitée. J’observe comment les Chinois s’en sont emparés mais la complètent par leurs croyances spécifiques. Mais l’homme chinois est très différent de l’homme occidental. La structure psychique est difficilement comparable. L’organisation des croyances, la place de la logique (naturellement dialectique!), l’importance des connaissances est spécialement déroutante pour un esprit cartésien, par exemple.

En même temps, ils sont « to the point », concentrés sur le concret, en prise pratique, je dirais même pragmatique sur le monde, d’une différente manière que l’américaine… Je dirais provisoirement qu’ils sont moins piégés par l’abstraction rationaliste, qui est le défaut du système américain, mais plus piégés par l’abstraction poétique, qui les mène à surévaluer les formes, le prestige, le symbolisme. Volonté de puissance maladive, là aussi, mais maladie très différente. La VP américaine a la grippe, mais très grave, approche de la pneumonie… La VP chinoise a l’hépatite et ne pourra pas tout digérer dans sa goinfrerie. L'une est aux soins intensifs, on doute de son rétablissement... l'autre a besoin d'un régime encore inconnu ! Peut-être pas un régime "communiste!"... Bon. Que sais-je ?

Les deux côtés du monde exigent un grand penseur, qui viendrait proposer une grande synthèse, ou une médecine radicale, un nouveau but. Marx et Nietzsche sont à garder, c’est clair. Ce qui l’est moins c’est comment aller plus loin et dénouer les chaînes l’avenir. Confucius, je suis moins sûr… Zhuangze (Tchouang-Tsé), oui… selon mon goût ! Sauf pour son rêve du papillon, influence bouddhiste. Ce réel est incontournable. Mais… qui suis-je et surtout pour me prononcer !??

C’est pourquoi je veux approfondir ma connaissance de la planète chinoise, qui est un peu comme un autre monde, en tout cas une autre perception, perspectives différentes sur le monde. L’approche comparatiste est préliminaire à la production d’une nouvelle sagesse, par la grâce d’un saut qualitatif, qui est envol intuitif. Tout en continuant de méditer sous le patronage de Aurobindo.

Ah oui, autre particularité : la figure de Sartre me semble encore d’actualité, pour toute cette sorte de problèmes. Et l'espoir s'élargit à nos yeux, après quelques détroits, si l'on évite le gros des catastrophes et des guerres.

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