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mercredi 1 décembre 2010

-------------- Attitude interrogative ? --- Angoisse ?

Questionner, se mettre en quête, sortir de soi, c’est l’errance. Peut-être sera-t-elle sans fin ? Questionner c’est errer, se mettre de travers, se fourvoyer dans l’erreur. À moins que la question revienne sur soi, opère un retour chez soi, sur elle-même, que la question porte sur elle-même, sur son être et sur l’être qui la porte, sur l’être du questionneur. Le questionneur se questionne sur son être, qui n’est pas essentiellement l’être de la question, puisqu’il réalise bientôt qu’il n’aurait jamais dû sortir de chez soi. Là où commence l’errance, virtuellement sans fin, de par le monde, par les premiers pas de la connaissance.

Ni la question ni l’angoisse qui me jette hors de moi, me fait courir les routes, de la douleur et de la peur, du besoin et du profit, les chemins sans fin de l’intérêt ; ni la question ni l’angoisse ne touchent à l’essence de mon être. Cette liberté qui se questionne et qui s’angoisse, elle est toute intérieure, immanente. Elle est à la source, non-savoir et par là même essence immédiate et pleinement réelle, être véritable.

La question de l’être est une duperie. La liberté qui s’angoisse, un épouvantail. La liberté qui reste chez elle réalise qu’elle ne s’était jamais quittée. Seulement peut-être un peu oubliée, de ci de là, dans des pérégrinations imposées, comme des épreuves qui ne prouvent rien. À l’épreuve de soi-même seulement l’on s’aperçoit que l’on a erré. Fini le temps errance, voici venu l’ivresse joyeuse qui demeure.

samedi 20 novembre 2010

été indien (or, A little bird named Yezi)

(Écrit sur mon balcon au soleil le mardi 16 novembre 2010.)

Nous vivons maintenant les plus belles journées d’un été indien tardif, cette année… qu’est-ce que je peux faire de toute cette splendeur? être réceptif d’abord, m’emplir à raz-bord de cette bénédiction. Je lève les yeux au ciel, évitant de défier le soleil du regard, il me crèverait les yeux, Apollon, de sa flèche assassine!

Tout est bleu sattvique, pas un nuage dans tout ce ciel où l’on respire comme une impression de liberté sans limite. L’air est léger, d’une toute petite fraîcheur, il coule naturellement et te dit qu’il est l’ami de tes poumons et sa visite fréquente, rythmée, répétée donne la vie, l’énergie de consumer dans la claire conscience et la joie et la peine et ce soleil qui me cogne sur le caillou comme un guru à ma porte. Il me dit qu’il peut lui aussi déjà brûler et purifier jusqu’aux scories attardées de mon âme, des poumons au sang clair, des poumons au cœur pur et du soleil jusqu’à l’âme la splendeur d’en-haut éclaire, stimule, éveille la splendeur d’en-bas qui se retrouvera comme le Soi, ouverture, image vivante, miroir cosmique, source de vie divine.

brûlent, brûlent les scories de mon âme

chante chante la chanson de la vie

car la Joie est Divine

un petit oiseau me l’a dit!



Dans ma méditation guillerette au soleil, des pensées poussent comme des légumes, beaux, grands, blancs, nourrissant, avec des fleurs de toutes les couleurs, et en cet instant de sérénité, les malheurs du monde ne m’atteignent pas (qu’il se suffise à lui-même, le monde, et je suivrai mon chemin) — Se dit la part en moi du penser égoïste — dans les rivières de vérité, plusieurs ruisseaux coulent en même temps.

Puisque j’en ai ces jours derniers cruellement manqué, je fais le plein de toute cette joie offerte et mon cœur dilaté chante, avec ce petit oiseau que j’ai dit (petit oiseau nommé Yezi).

samedi 14 mars 2009

philosopher par gros temps

Philosopher à l'ère des catastrophes... Cela n'est pas évident. Dans les époques de calme apparent la préoccupation philosophique, le souci des "grandes questions" passe facilement pour une sorte de maladie mentale et déjà Aristote avait ses théories sur la mélancolie des hommes de génie. Mais c'est une création de la tradition philosophique occidentale que de considérer que l'histoire humaine est une et de bout en bout.

Et vous, n'avez-vous pas l'impression qu'il serait intéressant de savoir à quel bout nous en sommes ? Dans l'époque où nous sommes, celle des catastrophes approchantes et qui plus est, pour ce que nous en savons, catastrophes qui sont de notre propre fait, dans l'étalement massif de notre style de civilisation.

Ni au début, peut-être pas à la fin mais... au beau milieu d'une crise qui est plus qu'une simple crise de croissance, plus qu'une crise du concept même de la croissance : les économistes clairvoyants, comme les écologistes nous disent que la croisssance, telle du moins que nous la connaissons, n'est absolument pas soutenable.

Il n'est vraiment pas exagéré de dire que cette crise, que je croyais jadis être celle de l'adolescence de l'humanité est, plus exactement une crise existentielle où c'est la question de la poursuite dans l'existant qui est posée, soit le mode panique de la question souvent trop "pausée" de l'être. Le thème du tragique, ici, de l'existence humaine dans cette histoire sur cette planète, pas la seule et de loin!, est celui introduit par le génie sensitif que fut William Shakespeare. Mais la traduction qu'on nous propose est édulcorée, elle-même faite à partir du passage original en anglais où la ponctuation est défectueuse, ce qui détruit la radicalité du sens de la question qui est posée. Nous croyons qu'il faille lire :

"Être ou ne pas... mais être!, oui, voilà ce dont il s'agit !" C'est le moment crucial de la décision d'être, largement volontariste, qui voit la naissance du sujet moderne qui selon nous traduit plus nettement le problème posé par l'énoncé anglais à la ponctuation correcte : "To be or not... To be! That is the question!"

"The question" pas dans la sens contemplatif de l'intellectuel parisien, mais "l'affaire" en question, dans le sens hyperactif du businessman londonien.
Dans cette scène, qui tente de reprendre et d'assumer son être presque au niveau du choix originel, Hamlet se décide de combattre : pour récupérer l'exercice du pouvoir, il met ses fantômes derrière lui et se détermine à "vouloir le rien plutôt que de ne rien vouloir", ce qui est la définition selon Nietzsche du nihilisme actif.

Il y a plus de trente ans que je me tue, littéralement, à dire que la question qui se pose à cette époque où j'ai eu la chance de naître est une question existentielle de la décision d'être mais pour toute l'humanité, et je l'ai fait avec mes obscurités, quitte à m'engager dans une vie personnelle malheureuse. (Avec obsession sexuelle mais tristement incapacité à communiquer mon désir). Voilà pour la confession personnelle.

Mais aujourd'hui, où nous nous trouvons au-dessous de toute vérité, tant que cette question n'aura pas été nettement posée et en partie résolue, il est tout à fait légitime de dire : je vis ici et maintenant et puisque dans trente ans il est devenu inévitable que s'installe l'enfer sur terre, où ne survivra pas même 10% de la surpopulation actuelle (parce qu'il faut nourrir tout ce monde, alors qu'il n'y aura même plus assez d'eau à boire!) mon plaisir, aussi trash soit-il est la règle absolue de ma conduite.

Cette position de nihilisme subjectif, sous-variante d'un nihilisme actif, est aujourd'hui beaucoup plus répandue que l'on ne pense. Les discours officiels et les institutions perdurantes (c'est leur fonction) excluent l'expression de cette véritable stimmung de l'époque mais ne peuvent rien contre sa dominance. Mes sympathies en passant pour ceux qui trouvent encore la ressource de faire des enfants et de s'en occuper.

Philosopher aujourd'hui, oui mais, pourquoi : pour guider l'action ou pour justifier la destruction ? La seule chose qui m'est certaine c'est que l'on ne s'en tirera pas sans l'une et l'autre. Nous allons voir, dans les années qui viennent, entre autres choses, que la conception de la rareté déployée par Sartre dans Critique de la Raison Dialectique est tout-à-fait d'actualité, horizon non seulement de pensée mais aussi de (sur)vie !

À bientôt, chers dinosaures.